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Avis d’expert | Droit social Quel accident du travail en télétravail  ?

Le récent accord national interprofessionnel (ANI) du 26 novembre 2020 pour une mise en œuvre réussie du télétravail ­dispose que «  le télétravail étant une modalité d’exécution du contrat de travail, la présomption d’imputabilité relative aux accidents de travail s’applique également en cas de télétravail. Malgré les difficultés de mise en œuvre pratique, c’est ce que prévoit explicitement le code du travail  ». Ce point sans portée normative propre et sibyllin – témoignage de l’âpreté des négociations sur ce sujet – mérite explications.

«  Les accidents survenus par le fait du travail ou à l’occasion du travail  », selon la loi du 8 avril 1898 (qui a créé le régime spécial d’indemnisation des victimes d’accidents du travail), ouvrent à tout salarié une prise en charge de l’intégralité des dépenses de santé engendrées sans que la victime n’ait à faire l’avance des sommes, tout comme, le cas échéant, au versement de revenus de remplacement plus généreux que ceux versés hors accident du travail. La formulation de 1898 est reprise telle quelle dans l’article L411-1 du code de la Sécurité sociale.

Tout accident du travail se traduit aussi par une majoration pour l’employeur des cotisations relatives aux risques professionnels. Les accidents survenus durant l’exécution de la prestation du salarié sont légalement présumés imputables au travail. Cette fiction juridique, adaptée à un travail réunissant des personnes en un même lieu sous la direction de l’employeur ou de son représentant, a vu, du fait de l’évolution de l’organisation du travail, sa portée élargie par les tribunaux à «  tout accident survenu à un travailleur alors qu’il est soumis à l’autorité ou à la surveillance de son employeur  ». Tel est, par exemple, le cas si l’accident se réalise hors du temps de travail lors d’une mission à l’étranger. L’article L1222-9 du code du travail, qui organise le statut du télétravailleur, a ajouté une seconde présomption aux règles de sécurité sociale  : «  L’accident survenu sur le lieu où est exercé le télétravail pendant l’exercice de l’activité professionnelle du télétravailleur est présumé être un accident de travail.  » Ainsi, ni le critère du lieu d’exercice du salarié «  utilisant les technologies de l’information et de la communication  », ni celui de l’autorité patronale, ni la surveillance de l’employeur importent. La protection peut sembler efficace.

Toutefois, l’ANI signé fin novembre constate que «  si les dispositions légales et conventionnelles relatives à la santé et à la sécurité au travail sont applicables aux salariés en télétravail, il doit être tenu compte du fait que l’employeur ne peut avoir une complète maîtrise du lieu dans lequel s’exerce le télétravail et de l’environnement qui relève de la sphère privée  ». C’est là une porte ouverte à ce que l’employeur accompagne la déclaration d’accident du travail de réserves quant à l’origine professionnelle de l’accident en télétravail. La Caisse primaire d’assurance-maladie doit en ce cas mener une enquête ­contradictoire, puis décider s’il s’agit d’un accident du travail ou d’un accident domestique en respectant des délais très précis  : l’engorgement de cette procédure est à craindre.

Enfin, comme pour tout accident, l’employeur peut prouver que celui-ci est étranger au travail notamment parce que l’activité du ­salarié au moment fatidique n’éta it pas menée dans «  l’intérêt de l’entreprise  », mais dans celui du salarié (un jeu, une recherche sur Internet…). Les technologies de l’information seront convoquées comme outil de preuve.

Article Le Monde du 14 janvier 2021

Article publié le 14 janvier 2021.


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