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« Chez Deliveroo, le revenu horaire moyen des livreurs est de 12,50 € »

Rémunération, procès, salariat, comptes sous-traités à des sans-papiers… Melvina Sarfati El Grably, la directrice générale de la plate-forme britannique en France, répond aux questions qui fâchent.

Une croissance exponentielle. Portée par la crise du Covid, la plate-forme de livraison Deliveroo a atteint les 300 millions de commandes dans le monde en 2021, en hausse de 73 %. En France, après s’être implantée dans les plus grosses agglomérations, elle part à l’assaut des villes moyennes et travaille désormais avec 26 000 restaurants et 22 000 livreurs. Sans compter les partenariats avec Franprix, Carrefour, Monoprix, etc. Une expansion à quel prix ? Depuis son arrivée en France en 2015, Deliveroo est régulièrement pointé du doigt pour ses pratiques.

La loi vous oblige désormais à communiquer la rémunération horaire moyenne de vos livreurs. Quelle est-elle ?

Melvina Sarfati El Grably. Le gouvernement a souhaité instaurer de la transparence. Nous sommes ravis de communiquer sur cet indicateur et dissiper des idées reçues. Le chiffre d’affaires moyen d’un livreur par livraison, entre le moment où il prend la commande et la livre, est de 5,60 € pour un temps moyen de onze minutes. En faisant une extrapolation simpliste, on pourrait dire qu’il gagne environ 30 € par heure. Mais il y a des temps masqués, comme l’attente de la commande ou le déplacement vers le restaurant. Quand on les intègre, on arrive à un revenu horaire moyen de 12,50 € en France.

Leur assurez-vous une rémunération minimale ?

Pas en tant que tel, car les tarifs sont différents en fonction des courses. Certaines se font à l’aube dans une ville de province pour parcourir 100 m et d’autres le samedi soir, dans le trafic et sous la pluie à Paris. Ensuite, un livreur est libre de choisir. Il peut prendre la première course qui se présente ou les refuser toutes jusqu’à trouver celle qui l’intéresse. Il est maître de ses revenus.

L’application sanctionne-t-elle les livreurs qui refusent certaines courses ?

Absolument pas ! Notre modèle repose sur l’indépendance et la flexibilité des livreurs. Ils sont libres d’accepter ou de refuser n’importe quelle course à n’importe quel moment. D’autant plus qu’ils ont des contrats avec plusieurs applications de livraison. Ils arbitrent entre Deliveroo et un concurrent.

Deliveroo est renvoyé devant le tribunal correctionnel en mars. La société est soupçonnée d’avoir employé comme indépendants des coursiers qui auraient dû être salariés. Quelle est votre ligne de défense ?

Cette affaire couvre des faits allant de 2015 à 2017, aux débuts de la plate-forme. Nous contestons les chefs d’accusation. Nous avons eu, par ailleurs, quelques rares contentieux judiciaires individuels. Six décisions finales ont déjà été rendues en faveur de Deliveroo en France, la septième est en appel.

Votre concurrent Just Eat propose le salariat. Pourquoi pas vous ?

Parce que cela ne répond pas aux aspirations des livreurs. Deliveroo est une place de marché qui repose sur ces piliers : les consommateurs, les restaurateurs et les commerces de quartier, et donc les livreurs. Sans eux, Deliveroo n’existerait pas. On a donc besoin de livreurs qui ont envie de travailler avec nous. Or, quand on leur demande pourquoi ils ont choisi ce métier, pour plus de 80 %, la flexibilité arrive en haut de la liste. C’est un job d’appoint. Ils opèrent en moyenne moins d’un an et travaillent pour la plupart moins de vingt-cinq heures par semaine avec nous.

Des comptes de livreurs sont sous-traités à des sans-papiers. Que faites-vous pour y remédier ?

Un livreur peut sous-traiter légalement, en nous déclarant la personne qui utilise son compte. Ce que vous décrivez est une pratique frauduleuse que nous condamnons. Aujourd’hui, nous vérifions l’identité et la conformité des papiers au démarrage de notre collaboration. Mais ensuite, nous ne sommes plus en relation avec les livreurs pour chacune des commandes. C’est pourquoi nous allons mettre en place, dans les jours qui viennent, un processus de vérification d’identité ponctuel, avec une intervention humaine, sur la base de photos. Nous travaillons aussi sur une solution de reconnaissance faciale pour automatiser et amplifier ces vérifications. Elle sera en conformité avec les règles de protection des données. Nous travaillons aussi avec le ministère du Travail sur une charte visant à encadrer la sous-traitance.

Quels sont vos objectifs sur le marché français ?

On est au tout début de l’histoire. En moyenne, pour un Européen, un repas par semaine est pris grâce à la livraison de repas. On a une belle marge de progression, d’autant qu’avec le Covid, notre service est entré dans les habitudes des consommateurs. L’enjeu, c’est de les fidéliser. L’autre enjeu, c’est l’expansion géographique. Nous sommes présents en France dans une centaine de grosses agglomérations, mais on s’aperçoit que des villes plus petites sont prêtes. Enfin, nous voulons écrire une belle histoire sur le segment de la livraison de courses, à savoir les commerces de bouche, les grandes marques d’épicerie et notre nouveauté, la livraison en exclusivité des produits Picard. C’est un domaine extrêmement prometteur.

Article Aujourd’hui en France du 1er mars 2022

Article publié le 2 mars 2022.


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