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De nombreuses PME testent la semaine de quatre jours

Discrètement, depuis la pandémie, de plus en plus de PME testent la suppression du vendredi ou d’un jour de travail dans la semaine. Le rythme de 35 heures est souvent maintenu ou légèrement réduit.Les patrons qui l’ont mis en place revendiquent plus de bien-être et plus d’efficacité chez leurs salariés. C’est aussi un argument dans la guerre actuelle des recrutements.

La semaine de travail de quatre jours sort de la marginalité. La pandémie motive un nombre croissant de patrons de bouleverser l’organisation de leur entreprise pour offrir une journée de liberté à leurs employés. Le Centre des jeunes dirigeants, qui vient de faire le tour de ses 2.600 membres pour préparer ses doléances de campagne présidentielle, les a sondés sur cette innovation managériale.

« Plus de la moitié d’entre eux sont prêts à tester la formule, n’en revient pas Emeric Oudin, le président du réseau patronal. C’est vrai que nous n’avons que des retours positifs de ceux qui l’ont mis en place. » Lui-même avec les 18 employés de sa petite entreprise de vente d’équipements de protection Axe Environnement y réfléchit très sérieusement pour 2022. Plusieurs formules existent pour la semaine de quatre jours, le vendredi libéré étant la plus fréquente. La durée hebdomadaire reste souvent la même, autour de 35 à 39 heures, selon les statuts. Parfois un peu moins, parfois un peu plus. Sans jamais de perte de salaire.

Economies de carburant

Que ce soit au CJD ou ailleurs, les dirigeants avancent souvent pour premières raisons la volonté d’améliorer le bien-être de leurs collaborateurs, ainsi que l’attractivité de leur entreprise, deux enjeux que la pandémie a imposés à l’agenda des dirigeants. « La recrudescence des burn-out fait réfléchir. De nombreux salariés ont également quitté leur poste ou leur région, devenant plus exigeants sur le bien-être au travail. La semaine de quatre jours est un élément d’attractivité », abonde Emeric Oudin.

Le secteur d’activité d’Axe Environnement montre que l’innovation managériale n’est pas réservée aux jeunes pousses, même si elle a été médiatisée par quelques noms en vue du numérique comme le commerçant d’électronique lyonnais LDLC ou, plus récemment, le site d’emploi parisien Welcome to the Jungle. Dans les Vosges, Régine Crouet, qui a créé, il y a quinze ans, la société de location d’engins JC Logistique n’a pas attendu la pandémie pour supprimer en 2019 un jour de travail hebdomadaire dans l’équipe des magasiniers.

Le service qui représente un cinquième des effectifs de cette PME de 50 personnes pour 8 millions d’euros de chiffre d’affaires, n’était pas demandeur. Elle a convaincu l’un de ses salariés les plus opposés d’essayer, il est devenu le plus fan. Comme les autres, il apprécie le temps libre, mais aussi les économies de carburant. Un seul a préféré rester aux cinq jours. Cette équipe, qui était aux 39 heures, continue d’effectuer ce volume d’activité, mais au rythme de 9 à 10 heures de travail quotidien. L’expérience a convaincu Régine Crouet d’étendre l’an prochain ce rythme à d’autres fonctions. La sienne notamment : « J’ai plein de passions, j’aimerais essayer de prendre des vendredis en 2022. »

Rogner sur les marges

Le francilien Nizar Alachbili, lui, a décidé de convertir d’un coup et en totalité sa société de services numériques aux entreprises. Le président de Groupe Ténor signera dans quelques jours avec son CSE l’accord collectif qui entrera en vigueur en janvier. La moitié de ses effectifs de 150 personnes sont aux 35 heures, ils passeront aux 32 heures grâce à un don de 3 heures hebdomadaires de la PME. Les autres employés au forfait jour verront leur plafond hebdomadaire passer à 34 heures. Le vendredi ne sera travaillé que par deux services, dont la hotline. Nizar Alachbili a fait passer depuis 2013 Tenor d’une TPE de moins de trois salariés au groupe actuel à travers 15 croissances externes. « Depuis 2019, nous avons atteint une taille critique que je veux stabiliser. Ces fusions commençaient à créer des tiraillements et je réfléchissais à un projet de rééquilibrage vie perso/vie pro. Depuis la pandémie, je constate comme ailleurs de plus en plus de mal-être dans les équipes. » Pour lui, le projet est rationnel financièrement : « A court terme, on va rogner sur nos marges, mais à moyen terme, je fais le pari d’avoir du personnel plus épanoui, plus efficace. »

Le chef d’entreprise tente aussi de cette façon de retrouver de l’attractivité. « Je sens un essoufflement depuis juin, jusqu’alors on n’avait aucun souci pour embaucher grâce à des croissances à trois chiffres, une image audacieuse, etc. » Il constate d’ailleurs que la semaine raccourcie est un argument écologique pour les jeunes candidats à l’embauche. « Cela va entraîner 40 % de déplacements de notre parc de 90 véhicules », promet-il. Chaque entreprise invente sa formule. Chez Design Bois, la société d’agencement en bois pour les magasins (90 salariés) dans le Rhône fait travailler certains employés du lundi au jeudi, d’autres du mardi au vendredi, ou hors mercredi.

Le fabricant d’engins de travaux publics Bosch Rexroth fonctionne avec trois équipes de six heures chacune, contre 2 de huit avant, sans perte de salaire. La semaine de quatre jours ne risque pas toutefois de se généraliser en France. Selon une étude du spécialiste RH ADP sur 1.900 salariés , 21 % seulement souhaiteraient réduire leur semaine. Et les organisations patronales comme le Medef balaient le sujet. François Asselin, président de la CPME, estime que l’immense majorité des entreprises ne peut pas fonctionner sur quatre jours . « Il est aussi plus fatigant de travailler 10 heures par jours que 8, ce qui pose un problème de productivité », assène-t-il. « Nous avons besoin collectivement de travailler davantage pour dégager plus de richesse », conclut le chef d’entreprise.

Article Les Echos du 10 décembre 2021

Article publié le 16 décembre 2021.


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