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La coupe des « aides » aux entreprises déborde

La Cour des comptes pointe le coût faramineux des exonérations de cotisations sociales (90 milliards d’euros) et appelle à réévaluer leurs effets sur l’emploi.

À côté de tout un arsenal de nouveaux sacrifices à imposer aux assurés sociaux, les employeurs devraient aussi prendre leur part au redressement de la situation. C’est, en substance, le sens des dernières recommandations de la Cour des comptes pour éponger le déficit des comptes sociaux. Si la doctrine budgétaire des magistrats de la rue Cambon ne surprend plus, les « sages » plaidant invariablement pour une « maîtrise » accrue des dépenses publiques, un chapitre du rapport annuel sur la Sécurité sociale, publié ce mardi, retient particulièrement l’attention.
Face à des comptes qui replongent dans le rouge (– 5,4 milliards d’euros en 2019), après des années d’austérité qui avaient fini par venir quasiment à bout du déficit, la Cour s’attaque à l’immense chantier des exonérations de cotisations sociales et autres dérogations aussi appelées « niches sociales », à côté des préconisations plus prévisibles de l’institution pour restreindre les droits à la retraite avant 62 ans, rationner la prescription des arrêts de travail ou encore réduire les dépenses des transports médicalisés.

Un gisement de ressources mal employées
Atteignant le niveau faramineux de 90 milliards d’euros, selon la Cour, rien que pour la part qui s’applique aux recettes de la Sécurité sociale (107 milliards, en incluant les autres régimes de protection sociale, retraites complémentaires et assurance- chômage), soit bien plus que les 66,4 milliards inscrits au projet de budget de la Sécu (PLFSS), le coût de ces exonérations s’est fortement alourdi en cinq ans.
En cause, les « mesures du pacte de responsabilité mises en œuvre entre 2014 et 2017 (9 milliards d’euros) ainsi que la transformation du CICE en des allègements généraux (de cotisations) en 2019 » pour 18 milliards d’euros, pointe la Cour. Parallèlement, d’autres allègements dits « ciblés » ont continué aussi de croître, faisant grimper l’addition finale (+ 1,6 milliard).
Bref, pour les magistrats, la coupe des allègements est pleine, tandis que « par ailleurs, les évaluations de l’efficacité des “niches sociales” n’ont pas d’effet perceptible sur les choix publics », celles jugées inefficaces n’étant que « rarement remises en cause ».
Un diagnostic « salué » par Pierre-Yves Chanu, vice-président (CGT) de l’Agence centrale
des organismes de Sécurité sociale (Acoss) : « Cela va dans le sens de ce que dit la CGT sur la “politique de l’offre”, laquelle multiplie les exonérations sans effet démontré sur l’emploi.
Les deux derniers PLFSS ont représenté de ce point de vue des budgets de rupture.
Si les « sages » ne vont pas jusqu’à remettre en cause « l’intégration des allègements généraux au barème de droit commun » (c’est-à-dire la pérennisation des principales exonérations), qu’ils jugent « souhaitable », ils posent cependant des « préalables », sous la forme de « nouvelles évaluations » de ces aides. « Dans l’attente des résultats (…), l’efficacité incertaine des dispositifs devrait conduire à en organiser l’attrition », écrit la Cour dans un style alambiqué.
Il s’agirait, dans les faits, de décider d’une sorte de moratoire sur les aides supérieures à 100 millions d’euros à l’utilité non avérée.

Reste une contradiction à résoudre : celle qui consiste à identifier, d’un côté, un gisement de ressources mal employées pour la Sécurité sociale et, de l’autre, à persister à vouloir imposer de dures restrictions aux assurés sociaux.
« Le déficit de la Sécu était prévisible et n’a rien à voir avec les mesures gilets jaunes, car il est fondamentalement dû aux exonérations de cotisations », accuse ainsi Pierre- Yves Chanu. Avec 90 milliards de recettes dont l’utilisation serait à réévaluer, les termes du débat sur la réforme des retraites pourraient aussi s’en trouver bouleversés…

Article L’Humanité du 9 octobre 2019

Article publié le 9 octobre 2019.


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