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Orange bloque sur le nœud Scopelec

Près de 2 000 emplois sont menacés chez ce sous-traitant historique, écarté d’un appel d’offres sur la fibre. Un sujet sensible avant la présidentielle.
Salariés de Scopelec en grève, à Saint-Orens-de-Gameville, près de Toulouse, le 3 février. Le patron de la Scop interpelle Orange « sur sa responsabilité sociétale et économique », avec 1 800 emplois en jeu.

Le nom de Scopelec va-t-il s’inviter dans la campagne présidentielle de 2022 ? A deux mois du premier tour, ce gros sous-traitant d’Orange, qui, avec 3 600 salariés, est aussi la première société coopérative et participative (Scop) de France, joue sa survie. Abordé par l’opérateur sous un jour technique, ce sujet social pourrait prendre un tour politique. A Whirlpool, tournant de la campagne en 2017, 300 emplois étaient en jeu. Aujourd’hui, 1 800 salariés de Scopelec retiennent leur souffle.

L’affaire se passe dans le contexte du fibrage du territoire français. Fortement soutenu par l’Etat, Orange a pris la tête de ce chantier. A lui seul, l’opérateur a connecté pas moins de 25 millions de foyers, en recourant massivement à la sous-traitance pour les travaux. Parmi ses partenaires, se trouve Scopelec, avec lequel il collabore depuis cinquante ans. Orange avait même accompagné la Scop dans sa consolidation, quand elle a grossi en rachetant une myriade de petites sociétés.

Mais les relations avec ce « partenaire stratégique » se sont détériorées : fin décembre, Orange a annoncé que la Scop n’était pas retenue dans le vaste appel d’offres lancé fin janvier 2021 pour allouer, à l’échelle nationale, les travaux de construction et maintenance de ses réseaux sur la période 2022-2025. Un coup de massue : 40 % du chiffre d’affaires de l’entreprise va s’évaporer à partir du 1er avril, ce qui l’oblige à licencier 1 800 personnes.

L’opérateur et son fournisseur se renvoient les arguments dans une discussion qui tourne au dialogue de sourds. « Nous avions notre analyse des risques et des opportunités dans cette reconduction de contrat, mais ce scénario n’était pas envisageable », assure Thomas Foppiani, le président du directoire de Scopelec. « L’entreprise savait dès le mois de juillet qu’elle n’était pas présélectionnée en Occitanie. L’appel d’offres a été lancé très tôt afin de permettre une anticipation maximale de chacun des acteurs », rétorque Marc Blanchet, directeur technique et systèmes d’information chez Orange. Selon l’opérateur, l’enjeu de l’appel d’offres était double : anticiper une baisse d’activité globale de 20 % pour l’ensemble des contrats de sous-traitance, après des années de surchauffe. Et donner la priorité à la qualité.

PARTENAIRE DE POIDS

460 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2020. 3 600 salariés. 95 sites en France. 50 ans d’existence.

Manquements qualitatifs C’est sur ce critère « strictement qualitatif », et non financier, que Scopelec a été sorti du jeu, assure Orange. Scopelec aurait ainsi reçu 60 mises en demeure pour ses manquements. Des attaques que Thomas Foppiani récuse : « La qualité reste notre premier engagement. Quels ont été les critères ? Nous n’avons pas compris. » Le patron estime que sur 13 000 interventions par jour, les incidents sont inévitables. Interpellant Orange sur sa « responsabilité sociétale et économique de donneur d’ordre », le syndicat majoritaire CFE-CGC d’Orange doute aussi que les problèmes de qualité aient réellement motivé l’éviction de Scopelec. Dans ce cas, Orange n’aurait pas confié des zones cuivre à Spie, une entreprise sans cette expertise précise, observe le syndicat.

Entre l’opérateur, sous pression des pouvoirs publics, et l’entreprise occitane, « une porte s’est entrouverte », veut croire Thomas Foppiani. Réponse de Marc Blanchet : « II serait inenvisageable et inéquitable de revenir sur l’appel d’offres. » Il espère que Scopelec saura « saisir les perches » et faire en sorte que ses concurrents reprennent des salariés. Les fonds propres du sous-traitant ne suffisant pas à financer le coût du plan social, un redressement judiciaire pourrait néanmoins s’imposer à brève échéance. Le dossier circule entre le Comité interministériel de restructuration industrielle (Ciri) et le ministère des Finances. Scopelec sera le premier sujet brûlant de Christel Heydemann, qui prendra la direction générale d’Orange le 4 avril prochain.

Article Challenges du 10 février 2022

Article publié le 10 février 2022.


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