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Derrière des objectifs chiffrés, une perte d’autonomie qui se propage dans la fonction publique

La direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares) vient de publier les résultats d’une vaste étude autour des effets du new public management sur les organisations du travail dans les 3 versants de la fonction publique. Un mouvement qui a eu notamment pour effet de renforcer le niveau de contrainte sur les agents de première ligne.

De quelle manière les administrations publiques ont-elles emprunté les modèles organisationnels caractéristiques du nouveau management (new public management) et avec quelles conséquences sur l’intensité du travail des agents ? C’est en croisant les données statistiques issues de plusieurs études et notamment de celle sur les “Conditions de travail”, que la Dares, le service statistique du ministère du Travail, a pu tirer plusieurs enseignements sur les répercussions de l’irruption des nouveaux outils managériaux, notamment inspirés du secteur privé, sur l’organisation du travail dans les administrations.

Le croisement de ces données permet notamment de classer les catégories socioprofessionnelles de la fonction publique selon différentes formes d’organisation du travail. Les professions se classent ainsi dans les catégories “Autonomie métier”, “Autonomie évaluée”, “Contrôle direct”, “Lean management” (axé sur la rentabilité) ou encore “Taylorisme flexible”. La Dares établit, dans un premier temps, que si les formes d’organisation du travail des agents ont toujours été différentes selon les métiers et leur position dans les hiérarchies ministérielles ou territoriales, “plusieurs décennies de réformes managériales, de pression budgétaire et d’intensification du travail ont largement reconfiguré les relations entre acteurs au sein des bureaucraties publiques”.

Impact sur les professions organisées
L’analyse statistique montre en effet que les marges de manœuvre et les contraintes managériales se répartissent de manière très inégale entre les différentes catégories sociales qui composent l’administration. L’évolution de ces classifications entre 2005 et 2019 permet de constater que les professions organisées (enseignants, médecins, infirmiers, etc.) sont de moins en moins autonomes.
Ainsi 54 % d’entre elles se classaient dans la catégorie “Autonomie métier” en 2005 et elles n’étaient plus que 38 % en 2019. Ces mêmes professionnels étaient par ailleurs 6 % dans la catégorie “Contrôle direct” en 2005 et le taux monte à 12 % en 2019. “Les professions organisées subissent une certaine érosion de leur autonomie collective sous l’effet de la diffusion des techniques d’évaluation”, commentent les auteurs de l’étude.

Les cadres intermédiaires à la manœuvre
Les contraintes managériales pèsent également fortement sur les catégories de fonctionnaires employés et ouvriers, avec une hausse importante de ces professionnels classés dans la catégorie “Contrôle direct” ou dans la catégorie “Lean management”. Les chiffres montrent par ailleurs que les cadres intermédiaires de la fonction publique sont toujours très autonomes, même s’ils sont classés, pour près de la moitié, dans la catégorie “Autonomie évaluée”. Ils sont également de plus en plus nombreux, au fil des années, à être confrontés au lean management.

L’étude réalise par ailleurs un focus sur les cadres et notamment sur ceux qui reçoivent et travaillent à partir d’objectifs chiffrés. Une situation qui concerne par exemple 61 % des inspecteurs des finances publiques, 51 % des proviseurs et inspecteurs de l’éducation nationale, 37 % des ingénieurs de l’État ou encore 35 % des cadres de santé. Des cadres qui sont aujourd’hui très nombreux à être classés dans la catégorie “Autonomie évaluée”. Cette situation concerne notamment 60 % des inspecteurs des finances publiques, 45 % des cadres administratifs de l’État mais aussi 56 % des ingénieurs des collectivités locales et 59 % des cadres du secteur social dans les collectivités territoriales.

La Dares met également en avant le rôle des managers intermédiaires dans les organisations du travail et dans l’appropriation des nouveaux outils managériaux. “Les encadrants de proximité ont fait ce qu’ils pouvaient à partir d’une socialisation professionnelle qui les disposait soit à embrasser les techniques managériales, soit à les critiquer du point de vue des valeurs du service public pour continuer à faire fonctionner les administrations dans un contexte d’intense pression budgétaire et de reporting chiffré”, peut-on lire en commentaire.

Article Acteurs Publics du 17 mai 2024

Article publié le 3 juin 2024.


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