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Le gouvernement Barnier mise sur le non-remplacement des fonctionnaires

La fonction publique va subir des baisses d’effectifs. Pour réaliser des économies, Michel Barnier compte “fusionner des services publics” et “ne pas remplacer toutes les fonctionnaires qui partent à la retraite”. Le Premier ministre mise notamment sur des regroupements d’administrations et d’agences. Les syndicats dénoncent de “vieilles recettes” et le retour d’une “politique du rabot”.

La méthode Sarkozy à la sauce Barnier. Comme l’ancien président de la République, le nouveau Premier ministre compte s‘appuyer sur le non-remplacement des départs à la retraite de certains fonctionnaires pour faire des économies. “Dans l’effort que nous allons faire pour réduire la dette, il y aura deux tiers de réduction des dépenses publiques et ça va être très dur”, a prévenu Michel Barnier sur France 2, jeudi 3 octobre, à une semaine de la présentation du projet de loi de finances pour 2025. Un budget qui prévoira quelque 40 milliards d’euros d’économies.

Le nouveau Premier ministre a toutefois cherché à tempérer en réfutant l’idée d’une “période de rigueur” ou “d’austérité”. Mais, a-t-il ajouté, “il faut simplement ne pas raconter d’histoires aux gens” et “ne pas tirer des chèques en blanc sur la tête de nos enfants et de nos petits-enfants”. Alors, où le gouvernement Barnier compte-t-il trouver des économies ? Outre un reciblage des aides à l’apprentissage, il envisage donc aussi de réduire les effectifs de la fonction publique afin, explique-t-il, de “donner plus d’efficacité à la dépense publique”.

“On va fusionner des services publics, on va sans doute ne pas remplacer tous les fonctionnaires qui partent à la retraite”, a en effet annoncé Michel Barnier en évoquant le cas de ceux d‘entre eux qui “ne sont pas en contact direct avec les citoyens”. À ce stade, le gouvernement ne livre pas plus de détails sur le nombre et la nature des emplois visés. Les annonces du chef du gouvernement “entrent pleinement dans la logique de rationalisation et d’efficience engagée par le Premier ministre lors de sa déclaration de politique générale”, répond l’entourage du ministre du Budget, Laurent Saint-Martin, en renvoyant au budget 2025, qui sera présenté le 10 octobre.

Contrats avec les directeurs d’administration centrale

Michel Barnier a toutefois profité de son intervention sur France 2 pour répéter sa volonté de “faire mieux ou aussi bien” dans le secteur public “avec moins d’argent”. “On va regrouper des administrations et des agences de l’État qui sont des doublons”, a-t-il précisé, deux jours après avoir promis, dans sa déclaration de politique générale, de faire la “chasse aux doublons” en misant notamment sur la mutualisation et le regroupement d’agences et opérateurs “qui ont des objectifs communs”, tels que Business France et Atout France. Sur France 2, il a confirmé vouloir davantage responsabiliser les patrons d’administration en nouant avec les directeurs d’administration centrale (DAC) des “contrats de simplification et d’économies” dans une logique de productivité.

L’annonce du chef du gouvernement sur les effectifs de fonctionnaires intervient aussi au lendemain de la publication d’un rapport de la Cour des comptes sur les finances locales, où la Rue Cambon suggère de ne plus remplacer systématiquement les agents territoriaux partant à la retraite et, à terme, de supprimer 100 000 postes au sein des collectivités, soit 5,5% de leurs effectifs. Selon les magistrats financiers, ces suppressions permettraient de réaliser une “économie importante” de l’ordre de 4,1 milliards d’euros par an.

Les collectivités associées à l‘effort

“Cela ne sert à rien de montrer du doigt les gens”, a répondu Michel Barnier à propos de cette préconisation, cherchant à tempérer alors que l’Association des maires de France (AMF) a de son côté dénoncé la “brutalité” des propositions de la Cour. “Le personnel territorial ne peut être réduit à une question comptable”, estime l’association présidée par le maire LR de Cannes, David Lisnard.

“Je veux faire des réformes, pas sans les gens, sans les collectivités, sans les syndicats, mais avec eux”, a assuré le Premier ministre, en précisant toutefois que “chacun doit se retrousser les manches”. Comprendre : l’État comme les collectivités, qui seront amenées à contribuer à l’effort de redressement des finances publiques. Le rapport de la Cour des comptes “est une contribution précieuse”, avait précédemment réagi l’entourage du nouveau ministre de la Fonction publique, Guillaume Kasbarian, auprès de l’AFP. Mais “il est important ne de pas l’interpréter comme une suggestion d’un sureffectif de 100 000 agents publics”, a-t-on précisé, en rappelant “l’engagement indéfectible de ces agents dans leur mission de service public”.

Guillaume Kasbarian dit néanmoins partager “l’analyse de la Cour des comptes sur l’optimisation des services publics locaux”. “Dans le respect de la séparation des pouvoirs, il réaffirme sa disponibilité pour travailler avec les collectivités locales afin d’identifier des pistes de simplification”, ajoute son entourage.

Une “fausse bonne idée” pour les syndicats

À entendre les derniers propos de Michel Barnier, cette “simplification” pourrait donc passer par une baisse des effectifs dans la fonction publique. Une piste déjà vivement critiquée par les syndicats du secteur, qui dénoncent une gestion comptable et le retour de “vieilles recettes”, à l’image de Christian Grolier, de Force ouvrière.

“C’est une fausse bonne idée”, critique ainsi Luc Farré, de l’Unsa Fonction publique, en craignant que le nouveau gouvernement ne “fragilise” et n’“affaiblisse les services publics et notre pays” par la suppression de postes. La CFDT dénonce quant à elle le “retour de la politique du rabot”. “Nul ne nie les contraintes budgétaires de la période, dont les choix politiques sont responsables. Nul ne nie la nécessité d’efforts, à condition qu’ils soient partagés et justes socialement”, explique Mylène Jacquot, secrétaire générale de sa branche Fonctions publiques, en se disant aussi “convaincue qu’il ne faut pas forcément toujours plus de moyens pour faire mieux”.

“Mais pour cela, encore faudrait-il éviter les paroles faciles et stigmatisantes”, ajoute la syndicaliste en dénonçant les termes de “débureaucratisation”, de suppression de “doublons” ou de “simplification”qui, selon elle, ne “cachent plus rien d’autre que des réductions d’effectifs sans réflexion anticipée sur les politiques publiques, les attentes et besoins des citoyens et usagers”. “Les attaques contre la fonction publique doivent cesser”, renchérit-on chez Solidaires, selon qui Michel Barnier “choisit de détruire un peu plus la fonction publique”.

Article Acteurs Publics du 4 octobre 2024

Article publié le 7 octobre 2024.


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