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Le pilotage énergétique des bâtiments publics pêche toujours

Par son caractère à première vue technique et complexe, le décret “Bacs” est peu connu des acteurs publics, alors que les échéances de ses objectifs approchent. En obligeant certains bâtiments à se doter d’un outil de suivi et de pilotage de leur consommation d’énergie, il représente pourtant une opportunité en matière de sobriété.

Moins connu que le décret “tertiaire”, qui fixe des objectifs d’économie d’énergie à différents horizons à l’ensemble du parc tertiaire, dont les bâtiments publics, le décret “Bacs” est tout aussi ambitieux. Également issu de la loi Élan de 2018, il en est même la première étape et son respect s’avère indispensable pour atteindre les objectifs français en matière de sobriété. “Le décret tertiaire est relativement simple à comprendre, tandis que le « Bacs » est plus complexe car il repose sur des notions de puissance nominale qui dépendent des différents systèmes installés au sein des bâtiments”, explique Maxime Scheffler, chargé de mission “Maîtrise de l’énergie” au sein de l’association Amorce.

Concrètement, le décret Bacs (pour building automation & control systems) a été mis en place pour inciter les occupants de chaque bâtiment à suivre et piloter leur consommation d’énergie. Il impose l’installation d’une plate-forme centralisée raccordant les différents systèmes énergétiques d’un bâtiment afin d’obtenir un diagnostic de départ, indispensable à l’élaboration d’actions de réduction des consommations, et donc d’atteindre les objectifs du décret tertiaire. Pour rappel, celui-ci demande aux bâtiments de réduire de 40 % leur consommation d’énergie en 2030 par rapport à 2010, de 50 % en 2040 et de 60 % en 2050.

Opportunité financière
Chauffage, ventilation, traitement de l’air, éclairage… “Tous ces systèmes vont devoir être raccordés à un système central, qui va piloter et suivre en continu les consommations”, résume Maxime Scheffler. Une manière, notamment, de détecter les anomalies : par exemple, les gestionnaires vont pouvoir observer si un pic de consommation intervient alors que le bâtiment est inoccupé et ainsi rectifier le tir, comme pour une climatisation qui serait allumée sans que la température ne le nécessite.
Selon les estimations, l’installation d’un tel système permettrait de réduire de 5 à 15 % la consommation d’énergie, voire davantage, par rapport aux bâtiments ne disposant pas d’outil de suivi. “C’est vraiment la première marche dans la stratégie des collectivités pour réduire leur consommation énergétique” assure l’expert “Bâtiment public” d’Amorce.

Le décret vise à répondre à une problématique de taille pour les collectivités, les bâtiments publics représentant 78 % de leur consommation d’énergie et 69 % de leur dépense énergétique. L’enjeu est donc non seulement environnemental, mais également financier, car respecter le décret Bacs permet de réduire les factures. L’installation de ce type d’équipement est généralement rentabilisée avant six ou sept ans, en faisant “l’une des actions ayant le plus faible délai de retour sur investissement dans le milieu de la rénovation du bâtiment, assure Maxime Scheffler. Les économies réalisées vont permettre d’abonder un fonds pour réaliser des travaux plus importants, ce genre de système permet vraiment d’avoir une stratégie à moyen et à long terme”.

Pour autant, le sujet est encore peu maîtrisé par les principaux concernés. “Encore beaucoup de collectivités, notamment les plus petites, ne sont pas tout à fait mobilisées sur le décret Bacs et ne l’ont donc pas forcément intégré à leur stratégie, analyse Maxime Scheffler. Il y a vraiment un enjeu d’accompagnement pour la réalisation d’un état des lieux, savoir d’où elles partent, quels bâtiments sont concernés afin de prioriser ceux à équiper en premier.” Selon une enquête présentée le mois dernier par l’association à ses adhérents, 9 personnes interrogées sur 10 estiment que leur collectivité est moyennement ou mal informée sur le décret Bacs.

Échéances ambitieuses
La réglementation exige que les bâtiments neufs aillent plus vite que les existants. Un autre critère fait varier les échéances : la puissance nominale installée. Au 1er janvier 2025, l’ensemble des bâtiments ayant une puissance supérieure à 290 kW (c’est-à-dire les plus importants) seront concernés. La consommation d’énergie variant en fonction de la typologie du bâtiment, il n’y a pas de surface type. Mais globalement, cela concerne les bâtiments mesurant plusieurs milliers de mètres carrés, comme les collèges et les lycées.
La deuxième échéance, fixée à 2027, concerne les bâtiments équipés d’un système dont la puissance dépasse les 70 kW. “Beaucoup de bâtiments seront alors intégrés, on se rapproche des bâtiments concernés par le décret tertiaire, c’est-à-dire supérieurs à 1 000 m2”, détaille Maxime Scheffler.

Mais même les collectivités les plus impliquées dans le décret Bacs et dotées de moyens humains et techniques suffisants rencontrent des difficultés à le mettre concrètement en place. “À part quelques cas particuliers, même les collectivités les plus avancées seront en retard par rapport à la réglementation”, alerte le représentant d’Amorce.

À titre d’exemple, la ville d’Annecy s’est engagée depuis longtemps sur le sujet. Elle a mis en place une stratégie, mais du fait de l’importance des coûts, ne peut pas couvrir l’ensemble des bâtiments et doit prioriser les installations. Et capacités financières et humaines ne sont pas nécessairement synonymes de “bon élève”. “Certaines grandes villes sont beaucoup plus en retard, et le seront d’autant plus en 2025 : beaucoup de gros bâtiments publics n’ont pas de système Bacs, et donc pas de suivi régulier des consommations”, prévient Maxime Scheffler.
Il n’est pas possible, à ce jour, d’avoir une vision fiable concernant l’avancée de la mise aux normes. L’ensemble des acteurs assujettis au décret tertiaire doivent renseigner leurs données sur la plate-forme “Opéra”, pilotée par l’Agence de la transition écologique (Ademe), et bien que les informations commencent à arriver, la détermination du nombre total de bâtiments soumis au décret tertiaire n’est pas encore connue. “Des études sont en cours mais ne sont pas encore sorties. Il est donc difficile de savoir combien d’acteurs sont à jour sur leurs renseignements”, poursuit Maxime Scheffler.

Bientôt la fin des financements
Des difficultés renforcées par le peu d’accompagnement proposé pour financer l’installation de ce type de système. Les collectivités peuvent toutefois bénéficier, jusqu’à la fin de l’année, de financements des certificats d’économies d’énergie (CEE), à partir d’une fiche standardisée qui détermine un forfait de subvention. En revanche, cette fiche a été révisée en début d’année, réduisant le champ des bâtiments éligibles. Par exemple, elle exclut désormais les amphithéâtres, les musées ou encore certains établissements sportifs comme les gymnases, qui représentent pourtant des sources d’économies d’énergie importantes du fait de leur usage intermittent. 
Il existe également une bonification permettant d’obtenir un taux de couverture deux fois plus important des CEE, mais elle devrait cesser à partir du 30 juin prochain. “Beaucoup de collectivités n’ont pas eu l’occasion d’en bénéficier”, regrette Maxime Scheffler. L’association Amorce appelle donc à la prolongation de cette bonification – qui avait déjà été prolongée de six mois, alors qu’elle devait initialement être suspendue au 31 décembre 2023 –, à la pérennisation de la fiche CEE et à la réintégration des bâtiments qui en sont désormais exclus.

Un outil pour identifier les besoins 
Face au besoin croissant d’accompagnement qui émane des collectivités au sujet de la consommation d’énergie, Amorce a développé l’outil en ligne “eSherpa”, avec la Banque des territoires. L’objectif : permettre aux collectivités renseignant les données de leurs bâtiments d’identifier les plus énergivores, de les comparer avec la moyenne nationale et ainsi préconiser des scénarios d’action pour chaque bâtiment afin d’atteindre les objectifs du décret tertiaire. La plate-forme permet également de connaître l’impact de ces scénarios sur la facture énergétique et les émissions de CO2 du parc immobilier de la collectivité. Enfin, il mentionne les pistes de financement pouvant être mobilisées par les collectivités souhaitant engager des travaux.

Article Acteurs Publics du 3 juin 2024

À l’issue du séminaire gouvernemental consacré à l’écologie organisé le 30 mai dernier à l’initiative du Premier ministre, Gabriel Attal, le ministère de l’Économie a partagé un document intitulé “À Bercy, on agit !”, dressant le bilan des actions environnementales engagées à destination du verdissement de l’économie mais également en interne. Il revient notamment sur le plan “Bercy Vert” lancé en 2020, que 85 % des agents soutiendraient aujourd’hui. Selon le ministère, cette démarche aurait permis de réduire de 20 % sa consommation d’énergie depuis 2019.

Article publié le 17 juin 2024.


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