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"Si l’on fait sauter le système des catégories, il faudra aussi faire sauter le système des corps"

Le politologue Luc Rouban revient pour Acteurs publics sur la piste évoquée par le ministre Stanislas Guerini de remettre en cause l’organisation de la fonction publique par catégories dans le cadre de la nouvelle réforme à venir.
 

Le ministre Stanislas Guerini vient d’annoncer sa volonté de revoir l’organisation de la fonction publique par catégories afin de casser certains "plafonds de verre".

Que pensez-vous de cette piste ? 
 
Il existe évidemment un problème aujourd’hui. Cette définition des catégories est quand même très formelle dans la mesure où elle reste calée sur les diplômes. Elle ne colle plus du tout à la réalité marquée par un phénomène de surdiplômés. Résultat : beaucoup de gens ont des masters mais se situent encore en catégorie C alors qu’ils auraient pu candidater en catégorie A. Ceci a ainsi complètement bouleversé le système des concours internes. Ceux-ci étaient conçus à l’origine pour permettre à des gens -qui justement n’avaient pas de diplômes- de rattraper leur retard scolaire ou universitaire et de faire valoir leurs compétences professionnelles. Ce dispositif des concours internes a ainsi fini par tourner en rond puisque de plus en plus de personnes visaient, par stratégies, des postes plus bas que ceux auxquels ils auraient pu prétendre. Ce système met donc de plus en plus à l’écart ceux qui n’avaient pas les diplômes. À ce phénomène de surdiplômés, il faut aussi ajouter l’extension progressive de la catégorie A où l’on trouve désormais des professeurs des écoles ou des infirmiers.
 
Quelles sont les conséquences de cette extension de la catégorie A ?
 
Cela bouleverse beaucoup les hiérarchies et donc les catégories : on va retrouver dans la même catégorie A des professeurs des universités et des professeurs des écoles, ce qui n’a absolument aucun sens. Ce tassement des hiérarchies n’est pas une bonne chose pour la gestion des agents et leurs déroulements de carrières. 
 
Il y aurait donc urgence à mener une réforme d’ampleur selon vous …
 
Les règles ne correspondent plus à la réalité du terrain. Changer de catégorie exige généralement de passer un concours ce qui est très lourd et complexe. Mais si l’on fait sauter le système des catégories, alors il faudra aussi faire sauter le système des corps. Et, donc, après bien des années de tergiversations, on va finir par arriver à une fonction publique de l’emploi comme le font beaucoup de nos voisins européens. À l’image de la diplomatie ou des inspections générales de l’État, ces corps se transformeraient alors en cadres d’emploi alors que le système par corps est aujourd’hui éclaté avec des gestions très parcellaires de chaque univers.
 
L’État est-il capable de gérer une telle "fonction publique d’emploi" ? 
 
Il faut une véritable réforme de fond car le système est à bout de souffle. Jusqu’à présent, les dernières réformes ont procédé à des ajouts et retouches successifs qui ont entrainé des complications et complexités juridiques et normatives. Il est donc désormais urgent de mener une réforme structurelle de la fonction publique si l’on veut relever le défi de l’attractivité de la fonction publique. Ce chantier reste néanmoins très compliqué, d’autant plus avec le peu de temps qu’il reste jusqu’à la fin du quinquennat.
 

Article Acteurs Publics du 14 mai 2024

Article publié le 22 mai 2024.


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