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Financement des retraites : touchez pas au grisbi !

Le quotidien patronal les Échos a le sens de l’opportunité, malgré lui. Il vient de publier des articles annonçant que le recul de l’âge de départ des salariés à la retraite à 64 ou 65 ans proposé par Emmanuel Macron, Valérie Pécresse et Éric Zemmour, candidats à l’élection présidentielle, pourrait« rapporter »entre 10,7 et 18 milliards d’euros. Emporté par l’ivresse du surf sur des milliards, il annonce ingénument un peu plus loin dans le journal que« les géants du CAC 40 ont dégagé près de 160 milliards de profits en 2021 ». Sourd, aveugle, ou peut-être prudent, il n’établit aucun lien entre les deux informations.

Les prétendues économies permises par le recul à 64 ou 65 ans de l’âge légal du départ en retraite ont été calculées par un organisme qui n’est pas au-dessus de tout soupçon : l’Institut Montaigne, club de « réflexion » du patronat et de la droite libérale financé par les subsides de quelque 200 entreprises, dont LVMH, Total, Vinci, Carrefour, Renault… et créé par Claude Bébéar. Cet homme, ancien patron et aujourd’hui président d’honneur du géant de l’assurance AXA, a soutenu Nicolas Sarkozy puis Emmanuel Macron lors des élections présidentielles de 2012 et 2017. Sans lui faire de procès d’intention, on pourrait penser que l’homme d’affaires prêche pour sa paroisse : Axa ne propose-t-il pas nombre de formules de retraite par capitalisation, c’est-à-dire grâce à des placements en Bourse ? Charité bien ordonnée…

Il faut croire cependant que les « experts » de l’Institut Montaigne ne lisent pas les Échos jusqu’au bout, car ils auraient pu se rendre compte que seulement 10 % des bénéfices des 40 groupes vedettes de la Bourse de Paris permettraient de maintenir l’âge légal à son niveau actuel, 62 ans, et 30 % de ramener cet âge à 60 ans. Mais tout ce beau monde, ces médaillés des conseils d’administration prêts à y siéger jusqu’à 70 ans, ces hommes politiques de droite et – hélas ! – parfois de gauche ont un credo commun qui tient en une formule : « Touchez pas au grisbi ! »Ils sont prêts à accepter certaines choses mais pas ça. Pour eux, le capital relève du sacré, s’en prendre à leurs privilèges, à leur patrimoine, à leurs pouvoirs, c’est impie, blasphématoire. Ils sont comme le personnage de l’Avare de Molière qui s’écrie lorsqu’il croit qu’on lui a volé sa cassette :« Hélas, mon pauvre argent ! mon pauvre argent ! et puisque tu m’es enlevé, j’ai perdu mon support, ma consolation, ma joie : tout est fini pour moi, et je n’ai plus que faire au monde. »Fabien Roussel, pour les affairistes, est évidemment un iconoclaste !

Article L’Humanité du 30 mars 2022

Article publié le 31 mars 2022.


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