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Gauche et syndicats s’inquiètent de mesures qui «  tuent les 35 heures  »

Pour l’opposition, les dispositions du budget rectificatif sont un moyen, pour le gouvernement, de contourner la question des salaires

La droite y voit un retour de la philosophie portée par Nicolas Sarkozy derrière le slogan devenu adage,«  Travailler plus pour gagner plus  ». La gauche y discerne un coup de sabot aux 35 heures. En adoptant le projet de loi de finances rectificative (PLFR), jeudi 4 août, les députés et sénateurs ont entériné deux mesures  : la possibilité pour les employeurs de racheter les RTT ­jusqu’au 31 décembre 2025, et le rehaussement pérenne du plafond de défiscalisation des heures supplémentaires (de 5 000 à 7 500 euros).

C’est sous la pression des députés Les Républicains (LR) que le camp présidentiel, à la recherche de compromis et favorable à l’esprit des dispositions, a donné son feu vert. La monétisation des RTT et la défiscalisation des heures supplémentaires, inscrites au programme présidentiel de Valérie Pécresse, appartiennent à la feuille de route idéologique de la droite. En 2007, sept ans après la mise en œuvre des lois Aubry sur la réduction de la durée légale du temps de travail à 35 heures, Nicolas Sarkozy s’était fait l’apôtre de la défiscalisation des heures supplémentaires, avant que la mesure ne soit supprimée par François Hollande – puis réintroduite par Emmanuel Macron en 2019.

Tout au long des discussions, arguant que ces mesures permettaient de revaloriser le travail et d’accorder aux salariés un gain de pouvoir d’achat, les élus LR ont donc joué de leur voix. «  On assume parfaitement de mettre un coin dans les 35 heures  », a lancé lundi 1er août la sénatrice Christine Lavarde. Le chef de file des sénateurs LR Bruno Retailleau a, lui aussi, avancé que «  les 35 heures ne sont certainement pas un gain et une avancée sociale pour tout le monde  », quand la députée Véronique Louwagie s’est félicitée du «  retour du “Travailler plus pour gagner plus”, cher aux Républicains  », «  pour que le travail rapporte toujours plus que l’assistanat  ».

A gauche, le tollé a été conséquent. Dénonçant un «  coup de force  » sans concertation syndicale visant «  à tuer les 35 heures  », les élus estiment que ces deux dispositifs servent de prétexte au gouvernement pour contourner la question de la revalorisation des salaires, qu’ils ont portée en vain durant les débats. «  Parce qu’ils voudront maintenir à tout prix leur pouvoir d’achat et parce que vous leur refusez une augmentation des salaires, [les salariés] n’auront d’autre choix que de renoncer à leur temps de repos  », a fustigé la députée socialiste Christine Pires Beaune jeudi. «  C’est aussi une attaque au financement de notre modèle social puisque les mesures prévoient des exonérations de cotisations sociales et d’impôt  », souligne le député écologiste Julien Bayou.

«  Vieilles recettes  »

Le sénateur socialiste Rémi Féraud critique une «  sarkozisation très assumée de la politique d’Emmanuel Macron  ». Son collègue de l’Assemblée Mickaël Bouloux a prévenu en séance que des élus de la Nupes saisiraient le Conseil constitutionnel sur les RTT afin de vérifier la conformité de «  la modification du code du travail au sein d’une loi de finances  ».

Du côté des syndicats, la colère est semblable. «  Au lieu de vouloir peser sur les politiques salariales des entreprises, de poser l’enjeu du partage de la valeur produite, de considérer les évolutions du travail et son intensification, le Parlement nous sert de vieilles recettes  », a regretté le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, dans un tweet. La CGT a, elle, critiqué jeudi le «  recours à la monétisation des RTT  », qui pose «  plusieurs questions  », dont celle de «  la remise en cause de la durée légale du temps de travail  », «  dans un contexte où de nombreuses luttes dans les entreprises sont menées pour travailler moins mais tou.te.s et mieux  ». Regrettant, lui aussi, «  la remise en cause des 35 heures  », Frédéric Souillot, secrétaire général de Force ouvrière, a questionné la portée de la mesure, jeudi sur RTL  : «  Combien de salariés vont être touchés  ? Ceux qui sont en forfait jour n’y auront pas droit. [Ceux de] toutes les entreprises où il y a un compte épargne temps non plus.  »

Mais dans le camp présidentiel, ces accusations sont renvoyées à de «  faux procès  ». «  Le rachat des RTT, c’est une faculté, ce n’est pas une obligation. Nous ne modifions en rien la durée légale hebdomadaire du travail qui reste à 35 heures  », a ainsi tenté de rassurer le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, jeudi devant les députés. Pour Jean-René Cazeneuve, rapporteur général du texte, «  c’est risible de ressortir le coup des 35 heures  », alors que ces mesures «  répondent à une demande des Français  », s’inscrivent dans le cadre du droit du travail et comprennent «  des garde-fous pour éviter tout abus  ».

Soulignant les insuffisances du paquet pouvoir d’achat en matière salariale, les syndicats appellent à la mobilisation générale le 29 septembre.

Article Le Monde du 6 août 2022

Article publié le 10 août 2022.


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