vous êtes ici : accueil > Divers

Vos outils
  • Diminuer la taille du texte
  • Agmenter la taille du texte
  • Envoyer le lien à un ami
  • Imprimer le texte

Sur le village olympique, le gaspillage alimentaire n’est pas évité

Les repas fournis par Sodexo pendant les JOP génèrent de grosses quantités de déchets, selon des témoignages recueillis par Mediapart. Seule une partie peut être récupérée par les associations d’aide aux plus démunis.

Des cartons de croque-monsieur décongelés « à consommer de préférence avant le 26 décembre 2024 » débordant d’une cagette, de grands sacs-poubelles pleins d’aliments sous emballage, des piles de cagettes remplies de pots de vinaigrette de 3 litres « à consommer jusqu’au 26 juillet 2024 », d’autres de sachets de soupe « pho bœuf » avec la même date de péremption...

Lundi 29 juillet au matin, dans le hangar desservant la cuisine du village olympique, à Saint-Denis, les déchets s’amoncelaient, selon le témoignage, recueilli par Mediapart, d’une personne travaillant à la préparation des repas pour Sodexo, photos à l’appui. Et jusque sur le parking attenant, des rangées de palettes d’aliments qui ne seront jamais consommés, enrubannés de cellophane, attendaient le ramassage.

De ce sous-sol situé sous le gigantesque restaurant des athlètes partent discrètement les déchets, en parallèle des près de 40 000 repas prévus chaque jour par l’entreprise de restauration, prestataire officielle des Jeux olympiques (JO) et paralympiques (JOP).

Le lendemain et le surlendemain la scène se reproduisait, avec d’autres produits, sous pléthore d’emballages. Sandwichs préparés la veille, grands sacs remplis de baguettes et de pitas, barquettes de houmous ou de pépins de grenade, sachets de salades ou de pommes grannys découpées en quartiers, plats cuisinés… Certains aliments sont périmés, d’autres pas du tout.

C’est ainsi qu’en cette première semaine de compétition olympique, plus d’une vingtaine de palettes, sans aucun tri préalable, partent chaque jour à la poubelle depuis le village olympique de Saint-Denis. Soit plusieurs tonnes de déchets alimentaires et d’emballages à usage unique.

Seule une petite partie des invendus – pour ceux qui sont encore consommables – sont récupérés, entre minuit et 5 heures du matin, par trois associations afin de les distribuer aux populations démunies : les Restos du cœur, les banques alimentaires, le Chaînon manquant. « Sur Saint-Denis et les sites franciliens, nous avons récupéré au total 14 tonnes d’invendus depuis le début des JO », explique Serge Malet, coresponsable de la délégation régionale d’Île-de-France des Restos du cœur, qui les distribuent dans la journée. Ce qui permet à l’association de fournir en ce moment 1 700 repas par jour. « C’est plus que ce à quoi nous nous attendions. »

Au village olympique de la métropole lilloise, où se tiennent les matches de basket et de handball, un important gaspillage a également été constaté pendant la première semaine d’ouverture, entre le 15 et le 22 juillet, alors que les athlètes n’étaient pas encore arrivé·es. Seule une quarantaine de personnes – principalement des membres de l’équipe d’organisation – venaient s’y restaurer quotidiennement, pour une quantité de nourriture largement surestimée. Selon le témoignage d’une personne travaillant dans ce restaurant également géré par Sodexo, cela a généré, les premiers jours, plusieurs centaines de kilos de déchets, dont seulement la moitié a pu être récupérée par les associations.

Ici, la plupart des préparations se font sur place, à base de produits frais, et ne peuvent être conservées plus de vingt-quatre heures. Les personnes employées par l’entreprise de restauration ont par ailleurs interdiction de ramener des invendus chez eux.

Si les quantités gaspillées semblent avoir diminué depuis que les athlètes sont arrivé·es, beaucoup de pain et de pâtisseries étaient encore jetés ces derniers jours, a observé notre témoin.
Défi alimentaire gigantesque

Contacté, le groupe Sodexo n’a pas donné suite à nos questions. Le comité d’organisation des JOP, sans répondre non plus à nos interrogations, nous a envoyé des éléments de communication par mail dans lesquels on peut lire que « 100 % des déchets alimentaires sont valorisés, au village comme sur les sites de compétition » et que « les déchets alimentaires non redistribuables sont valorisés en compost ou en biométhane » (retrouvez l’intégralité du mail en annexes).

Au total, 15 000 athlètes sont attendu·es pour les deux quinzaines de compétition et il est prévu 13 millions de repas et snacks sur l’ensemble des sites olympiques.

Pour répondre à ce gigantesque défi alimentaire de la façon la plus écologique possible, Sodexo s’est engagé à fournir un approvisionnement constitué à 25 % de produits en circuit court, issus d’un rayon de moins de 250 kilomètres du village olympique, et à proposer une restauration à plus de 60 % végétarienne. L’objectif, pour ces JOP 2024, était de diviser par deux l’empreinte climatique de la compétition par rapport aux éditions précédentes.

« Nos employés, chefs, responsables de site et personnels de cuisine sont engagés dans la lutte contre le gaspillage alimentaire, peut-on lire sur le site de Sodexo. En cuisine, nos chefs inventent des recettes qui utilisent différemment les aliments et adoptent une approche innovante de planification des menus afin d’y incorporer les restes, en ligne avec notre objectif de réduction de 50 % des déchets alimentaires d’ici 2025. »

Cet été olympique ne sera visiblement pas celui de la cohérence pour Sodexo. Le gaspillage alimentaire est pourtant une dimension majeure des désastres écologiques en cours sur la planète. Plus du tiers de la nourriture produite dans le monde finit à la poubelle. Et ce gaspillage est à l’origine de 10 % des émissions de gaz à effet de serre.

Article MEDIAPART du 2 août 2024

Article publié le 6 août 2024.


Politique de confidentialité. Site réalisé en interne et propulsé par SPIP.